En réponse à l’hétérogénéité des limites nous amorçons notre dessin en prenant comme point de départ une composition plus large que nécessaire. Ce surdimensionnement du motif créé une impression générale d’étendue. La composition choisie est la carte géologique d’un fleuve où l’on aperçoit les différentes variations de son cours. La matérialisation dans le projet de ces surfaces multiples et issues d’une grande variabilité sera à même de supporter l’hétérogénéité des aspects du contexte. Chacune des surfaces est composée d’un massif d’une seule essence végétale qui s’entrelace et se répartie en fonction des qualités propres à sa situation. Le dessin de la parcelle ainsi que le choix de l’implantation du bâtiment encourage le paysage à jouer avec la longueur. Cependant la distance réelle n’est pas une longueur d’usage : la parcelle ne permet pas de passer d’une rue A à une rue B. Dans ce cas le projet vise à créer une profondeur qui n’est, au premier abord, qu’une perspective. Cette situation (profondeur > perspective) a été inventée par le paysagiste Jens Jensen lorsqu’en 1930 il est chargé de dessiner la fin de la highway 42, dans le Wisconsin, qui s’arrête en cul-de-sac sur le lac Michigan. Nous adaptons à la situation de la parcelle cette stratégie de tracé sinusoïdale et nous venons transpercer la surface dessinée par la carte géologique. Les similitudes formelles entre la ligne du chemin de Jensen et les lits successifs de la rivière créent une tension entre le fond et la forme. Depuis la nervure centrale viendrons se déployer une série de cheminements secondaires qui la relierons aux halls d’entrée, à la sortie de secours du parking, au future parc … L’accès pompier ainsi que l’aire de retournement seront traités par un revêtement minéral qui s’intégrera au dessin général. Le dénominateur commun de la palette végétale sera la forme des feuilles : linéaires ou allongées elles donneront une texture souple au jardin. Les feuillages choisis pour leur beauté et leur caractère persistant créeront une ondulation de verts brillants ou intenses jouant avec les floraisons discrètes des Iris germanica au printemps puis des Crocomia et des Knifofia en été. Les Ophiopogon, les Liriope, les Festuqua et les Carex formeront des tapis entre les Scolopendrium, les Sasa kurilensis, les Osmonde royale et les Phormiums plus hauts. Des masses arbustives de Sasa palmata, de Yucca filamentosa et de Salix rosamarinifolia formeront des sous-espaces plus intimes.
Un jardin résidentiel